Alick était dans la salle de bain, dans une cabine, avec les vêtements mouillés, tremblant, seul. Koyuki l'y avait enfermé, quelques heures en amont, sans raisons apparente. Elle l'avait sûrement assommé, (où alors, était-ce lui qui s'était évanoui après une overdose de cookies ?), l'avait traîné jusqu'ici, avait ouvert le robinet de la douche, avait bloquée la porte, de façon à ce qu'elle ne s'ouvre pas et était partie. "Une farce, rien de plus..." s'était-il dit, avant d'essayer de sortir, sans succès. Maintenant, assis sir le sol froid et humide, la tête dans les mains, il attendait. Il attendait que quelqu'un arrive, qu'il puisse enfin s'époumoner et qu'on lui ouvre... Il n'attendait que ça.

Il voyait le jour commencer à décliner, et personne n'était encore entré dans celle salle. Alick avait sincèrement perdu tout espoir et commençait déjà à avoir des pensées morbides. Il leva la tête et contempla les graffitis au plafond. Il avait remarqué ceux dans les toilettes, mais pas ceux-ci. Il en remarqua un qui disait : "JE T'AIME ESPÈCE D'INTELLO !!!", il sourit. Lui, il aimerait tellement crier "JE T'AIME ESPÈCE DE FILLE PAS NORMALE !!" à toutes les planètes du système solaire, pourrir les murs de cette phrase, pirater le site internet du gouvernement Vénusien et la mettre en gros sur la page d'accueil, mais surtout, le dire à la principale concernée. Di. Il voulait Di, il la désirait de tout son cœur, tout son corps la réclamait, il la voulait pour lui tout seul. Mais, une fille comme elle ne voudrait jamais d'un type comme lui, plus ou moins rachitique, petit, avec un vrai nom affreux, avec un poste trop important à assumer pour un gamin de son âge, des amis tarés, vieux meurtrier de son beau-père, ayant laissé mourir sa mère, qu'on dirait qu'il est instable psychologiquement, détestant tout ce qui est calorique, enfin bref... Ça serait effectivement compliqué d'avoir un petit ami aussi... Compliqué.

Oh ! Et voilà que je me perds encore dans mes pensées... Raaaaa ! C'est cette cabine qui, comme une cage, emprisonne mon corps et mes pensées. Je ferais mieux d'élaborer une stratégie pour sortir de là... Grimper sur la pomme de douche et sortir par la cabine d'à côté ? Non, même si je suis léger, elle cèderait sous mon poids... Pfff... Non, il me faut définitivement un collaborateur. Ça me gênerait franchement qu'on m'ait enfermé dans la salle de bain des filles... Le problème, c'est que cette hypothèse est sincèrement plausible... Roooo non ! Je vais me payer la honte de ma vie ! Bon, dés que j'entends quelqu'un arriver, je m'époumonerais et puis ça sera réglé... Encore faut-il que quelqu'un arrive... Héhéhé... J'suis trop dans la merde...
[A ce moment là, mettez la chanson : http://www.deezer.com/fr/#music/result/all/smash%20mouth%20i%27m%20a%20believer et mettez-là en boucle !]
Bien sûr, le pauvre petit stratège n'avait toujours pas vraiment réalisé qu'il était dans une salle de bain, et donc, que pas mal de gens passaient par là tout les jours, rien que pour se laver... Enfin bon, on ne peut pas trop lui en demander hein, il est un peu perdu en ce moment, le pauvre petit... Enfin, à force d'attendre, ses pensées finirent par revenir vers sa bien-aimée. Comme un aimant, il ne pouvait pas détacher ses pensées d'elle, elle était... Bizarre, avec un caractère changeant, contaminée par une maladie inconnue, avec pleins d'amis douteux.. Mais elle était aussi tellement magnifique et attirante...
Oui, Alick pouvait l'affirmer maintenant, il aimait Di. Il n'osait pas y penser avant car il n'était pas sur de ses sentiments, il ne l'avait jamais ressenti avec une telle violence. Un tsunami d'émotions le submergeait et il ne pouvait pas les réfréner, la vague était plus forte que son mental. D'ailleurs, combien de temps avait-il mis pour se rendre compte de ses sentiments ? Un an ? Un mois ? Peu importe, retenons juste qu'il a été long à la détente...

Quelqu'un poussa la porte. Aussitôt, Alick fut alerte. Qui était entré ? Fille ou garçon ? Di ou pas Di ? En tout cas, c'était sûrement une fille vu le peu de bruit qu'elle faisait en marchant. Ce pas léger et silencieux, il croyait le reconnaître, mais était-ce vraiment elle ? Et si c'était-elle, qu'allait-il pouvoir lui dire ? Comment pouvait-il lui faire comprendre ses sentiments ? Comment être sûr des siens ? Pourquoi tant de question ?
A sa gauche, le robinet de la douche déversait déjà de l'eau, Alick ne réfléchissait décidément pas assez vite... Il tambourina aux murs de sa cabine en criant :
-Pitié ! Sauvez-moi ! Je suis à votre droite ! Juste à côté de vous ! On m'a enfermé ! Je ne peux pas sortir ! Pitié ! Sortez-moi de là !
La douche s'arrêta de fonctionner. On l'avait entendu ! Il était sauvé !
-Alick, c'est toi ?
-A votre droite jeune fille ! Heu... Di ?
-Alick ?
-Di ?
-Oui ! Alick ? C'est bien-toi, hein ?
-Oui, c'est moi, sort-moi de lààààààà ! Dit-il sur un ton de lamentation ultime.
-J'arrive, je met ma serviette et j'arrive !

En ouvrant la porte, Di trouva Alick prostré dans un coin de sa cabine, tout mouillé, tremblant, les lèvres voilettes, qui la regardait en souriant néanmoins. Oui, c'était bien elle, pensait Alick, encore plus magnifique que dans ses souvenirs (pourtant récents. Ah ! L'amour lui a vraiment fait tourner la tête...). Elle était emmitouflée dans un serviette blanche mais ne semblait rien porter en dessous. Alick rougit en faisant cette observation. C'était la première fois qu'il remarquait ce genre choses, et il trouvait ça franchement gênant.

-Donne-moi la main, t'es trop faible pour pouvoir bouger où quoi ?
-Non, non, Je--- Wah !

A peine Alick avait-il tendu la main qu'il se retrouvait debout, face à Di. Aussitôt, il arrêta de trembler et de claquer des dents : cette fille l'impressionnait toujours autant.

-Enlève tes vêtements, t'auras moins froid comme ça. Décréta Di sur un ton cassant.
-Heu... Tu crois ? Lui répondit Alick, un peu méfiant, Di était vraiment bizarre...
-Fais-ce que je te dis ! Tu me répugne à trembler comme un moineau qui a attrapé un rhume...

Aussitôt, elle se détourna d'Alick et s'avança hors de la cabine. Elle s'arrêta et reprit :

-Je ne te regarde pas. Tu te sèche avec la serviette sur la porte de ta cabine. D'ailleurs, elle était-là pour que tu puisse te pendre où quoi ?

Alick ne releva pas. Il ne savait pas ce qui se passait, mais elle était d'une humeur massacrante aujourd'hui. Ça serait peut-être un peu plus délicat que prévu de lui dire ce qu'il avait à dire. Une bouffée de chaleur passa dans le corps d'Alick. Il disait vouloir pouvoir prévoir le futur, mais, finalement, il aimait bien les situations où tout était imprévu. On avait beau analyser toutes les possibilités, aucune n'était plus plausible que les autres. Il sourit. Il savait comment lui dire. Ça serait peut-être plus ardu que prévu, mais il avait trouvé, c'était le principal.

Il se « désapa » (comme l'aurait dit Koyuki ou Wendy) donc entièrement, sans oublier ses chaussettes (qu'il ne quittait que pour aller dans la douche, oui, Alick à un côté Papy, il dort avec ses chaussettes.) et s'avança sans bruit vers Di, qui regardait les graffitis sur le plafond (signe d'un profond ennui, vous l'aurez compris). Il posa ses mains sur les épaules de la femme la plus importante de Vénus, elle frissonna mais ne dit rien. D'un geste brusque, il la força à se retourner vers lui. Ils étaient maintenant face à face et Di ne tarda pas de remarquer qu'Alick était plutôt dévêtu qu'autre chose :

-Mais... Qu'est-ce que tu f---

Alick la fit taire en posant un doigt sur ses lèvres. Il avait été jusqu'au bout, maintenant, il fallait qu'il parle. C'était franchement moins facile qu'il ne l'avait prévu; concentrer tout ce qu'il ressentais en quelques mots.. c'est quasiment mission impossible. Mais bon... :

-Di, je... Ça fait juste deux heures que j'ai envie de te dire ce que je vais dire, mais, ça ne change rien. Je suis sûr, qu'au fond de moi, je voulais te le dire depuis la seconde où je t'ai vue. Voilà... C'est le moment fatidique et je ne sais plus quoi dire... J'ai l'air idiot, non ?
-Pas du tout, au contraire, tu est très mignon...

Et ils s'embrassèrent. Une longue étreinte survit, deux corps ne formaient alors plus qu'un. Ils leurs semblaient alors que rien n'était impossible, qu'ils vivraient ensemble toute leur vie, que plus rien de fâcheux ne pouvaient leur arriver. Il se dirent beaucoup de « toujours » et de « jamais ». C'est de cette étreinte que naquirent deux jumeaux, ce qu'ils n'avaient franchement pas prévus... Ça n'était pas le bon jour, dommage !


Plume-Angelus ne se serait jamais douté qu'elle était en ce moment-même dans la cabine de douche ou avait été enfermé Alick Beaudelaire 50 ans avant... Bien sûr, les graffitis avaient désormais disparus et les douches avaient été modernisées... Elle ne se doutait pas non plus que ses le sang séché et imprégné dans le sol était le sang de Koyuki Karasu qui s'était coupée le pied en marchant sur un rasoir...
En tout cas, dans le jour présent, Plume-Angelus se lavait les cheveux, qui étaient toujours roses. Elle chantait un petit air tout en faisant mousser ses cheveux :

-I wanna stay home today
Don't wanna go out
If anyone comes to play
Gonna get thrown out
I wanna stay home today
Don't want no company...

Étant-donné qu'elle ne connaissait que le refrain, elle "mmmmait" l'air du reste de la chanson. Quand elle eu finit, elle sortit de la douche, enroulée dans une serviette verte pomme. La serviette était un peu petite pour la taille qu'elle avait prise aujourd'hui, découvrant ses jambes, ainsi qu'un beau décolleté. C'est là qu'elle entendit des pas venir vers elle, et donc, vers la salle de bains.